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Avant propos

 

LE COMMERCE EXTERIEUR DU LIVRE EN 2023

Statistiques douanières

En synthèse

Le chiffre d’affaires export[1] du livre français en 2023 affiche une légère hausse de 2,1% par rapport à 2022, à 709 millions d’euros.

Après le recul historique constaté en 2020 à 602,5 millions d’euros - les librairies francophones à l’international n’avaient pas bénéficié du même engouement que les librairies hexagonales pour la lecture des Français confinés -, les exportations de livres en 2023 dépassent significativement (+ 6,3%) le chiffre de 2019, année de référence du « monde d’avant-Covid », à 666,8 millions d’euros.

Cette augmentation de l’export de 2,1%, plutôt significative pour un secteur dit mature, apparaît même un peu plus affirmée que l’évolution du chiffre d’affaires net total de l’édition française de +1,2% par rapport à 2022 à 2 796 millions d’euros.

La part du chiffre d’affaires export par rapport au chiffre d’affaires de l’édition française[2] gagne ainsi 0,2 point en se hissant de 18,8% en 2022 à 19% en 2023.

L’analyse menée à partir de la nomenclature des douanes, -qui distingue 4 catégories : livres, encyclopédies, feuillets (produits imprimés non reliés) et cartes-images-atlas, confirme la hausse de la catégorie « livres » stricto sensu à + 2%, tandis que la catégorie « encyclopédies » baisse de 6,6%, la catégorie « feuillets » affiche une hausse de 5,6% et la catégorie « cartes+images+atlas » augmente de 4,1% versus 2022.

Notons que les statistiques douanières sont de plus en plus difficiles à exploiter.
Les chiffres 2023 publiés ici, comme ceux de 2022, prennent en compte des retraitements très importants, opérés en fonction des réponses à nos questions obtenues de la part des douanes françaises et aussi sur la base des chiffres collectés par la Centrale de l’Édition (activités Assurance-crédit et Transport).

Les deux principales sources d’erreur recensées dans les statistiques recueillies par les douanes sont les suivantes :

  • Transferts opportunistes par Amazon, de leurs stocks de livres français d’un pays européen à l’autre, à la recherche de coûts d’exploitation moindres ;
  • A la suite du Brexit début 2021, utilisation par certains exportateurs britanniques de la France, comme plateforme d’entrée dans l’Union européenne pour l’expédition vers d’autres pays de l’Union Européenne.

Ainsi pour 2023, un retraitement à la baisse de l’ordre de 220 millions d’euros au total a été opéré sur les exportations françaises vers plusieurs pays de l’Union Européenne.

Les importations de livres (incluant les livres français imprimés à l’étranger) ont baissé à 962,5 millions d’euros, - 4,8% par rapport à 2022 mais en hausse de 9,9 % par rapport à 2021, après un chiffre record dépassant 1 milliard d’euros en 2022.

Les importations et fabrications en provenance d’Asie (y compris l’Inde) ont régressé de 12,9% à 135,0 millions d’euros, après une année record en 2022 à 155 , du fait d’une demande exceptionnelle du marché français et de la forte hausse du coût de fabrication en Europe.

Le déficit commercial du livre se résorbe significativement à 253,6 par rapport à 317,3 un an auparavant : - 20%.

Sa part reste toujours modeste (0,25%) par rapport au déficit global de la balance commerciale française de 100 milliards d’euros. Ce dernier a bien diminué en 2023 par rapport au record de 2022 à 263 milliards d’euros.

Évolutions des principaux marchés à l’export

Zones francophones et non francophones
Sur un marché de l’export en développement de 2,1%, la francophonie est stable à + 0,9%.
Les pays francophones du Nord ont stagné par rapport à 2022 : + 0,4%.
Leur part de marché s‘est ainsi réduite de 1 point, à 63,3% du total.
La francophonie du Sud progresse pour sa part de 4,8%, portée par une reprise de l’Algérie après des années de chute des importations algériennes.
La part des exportations vers les pays non francophones en 2023 revient ainsi à 28,1%, son niveau moyen sur les huit dernières années.

Détaillé par zones géographiques, la hausse de 14,9 millions d’euros du chiffre d’affaires à l’export (+ 2,1%) s’explique par les quelques variations majeures suivantes :

  • La stabilité globale des importations des 4 premiers pays clients de l’édition française à l’export (+ 1,9%) : 
    Belgique, Suisse, Luxembourg et Canada.
    Ce groupe représente traditionnellement environ 54% de l’export total.
  • Les 4 premiers marchés européens (hors Belgique, Suisse et Luxembourg), l’Allemagne, l’Espagne, le Royaume-Uni et l’Italie peinent à retrouver leur niveau d’achats d’avant crise sanitaire.
    Ils restent dans leur ensemble à 10% en-dessous de la moyenne 2015-2020, tout en maintenant leurs postions de premier, deuxième, cinquième et septième rang des pays acheteurs de l’édition française.
  • Premier importateur historique du Proche et Moyen-Orient (60% des importations de la zone), le Liban a vu s’effondrer la demande du pays en 2020, à la suite d’une série de crises : crise financière fin 2019, toujours actuelle, crise sanitaire à partir de mars 2020 et explosion du port de Beyrouth début août de la même année.
    Le pays a réduit ses importations aux seuls livres scolaires et parascolaires des élèves des établissements enseignant en français. Il a ainsi enregistré une baisse vertigineuse de ses achats de livres français : de 8,8 millions d’euros en 2019 (chiffre habituel des années antérieures) à 1,8 millions d’euros en 2021, niveau le plus bas inédit, pour revenir à 4,4 millions d’euros en 2023, ce qui le porte de la onzième place des pays importateurs en 2019 au 21ème rang en 2023.
    Un accord financier avec le FMI (toujours repoussé faute de Gouvernement nommé et reconnu) permettrait le retour à la stabilité de la livre libanaise et une reprise significative des importations de livres sur un marché asséché en ouvrages français.
  • L’Amérique latine, violemment touchée par la pandémie mondiale en 2020 jusqu’à fin 2021, a désormais dépassé de près de 70% le chiffre d’importations de 2019 avec 11,2 millions d’euros, grâce notamment au chiffre du Mexique multiplié par 2,5 par rapport à 2022 à 5,5 millions d’euros.
    Le Brésil reste à un niveau historiquement faible à 0,5 par rapport aux achats de 2019 de
    1,2 millions d'euros.
    Les trois premiers importateurs brésiliens historiques ont fait faillite entre 2018 et 2022.
  • Maghreb : les importations de cette zone ont rattrapé le recul par rapport à l’année d’avant Covid 2019, année de référence :
    • en doublant à peu de choses près, les achats de l’Algérie par rapport à 2022, tout en restant très en dessous du niveau d’importations de 2013 (-11 millions d’euros).
  • Maroc : stabilité par rapport à 2022 : +1,2 % (+0,2 million d’euros) à 18,3 millions d’euros d’achats.
    Pour autant les achats avaient atteint un niveau record de 20 millions d’euros en 2017 et 2018.
    Et l’État marocain affiche sa volonté de privilégier désormais l’anglais comme première langue étrangère, au détriment du français, et ce dès le primaire.
  • Tunisie : hausse de 10% à 4,6 millions d’euros ; on reste toutefois assez loin du niveau record de 5,4 millions d’euros en 2019, avant la crise Covid.
  • L’Afrique francophone subsaharienne à 26,1 millions d’euros, affiche une baisse par rapport à l’an dernier (-8,9%) tout en dépassant l’année de référence 2019 (avant-Covid) à 23,6 M€, mais reste très en-dessous du record historique d’achats de 2014 de 42,3 millions d’euros qui avait enregistré un marché exceptionnel en République démocratique du Congo de près de 14,3 millions d’euros.
    • Le Sénégal connaît une année record à 5,5 millions d’euros (+ 82% vs 2022).
    • La Côte d’Ivoire à 4,7 millions d’euros et le Cameroun à 3,7 millions d’euros enregistrent des baisses respectives de 16% et 35%.
    • Rebond de Maurice avec 1,6 million d’euros d’achats de livres français (+33,5% vs l’an dernier), qui dépasse le niveau de 2019, après deux années de fort repli en 2020 et 2021 (crise du tourisme lié à la crise Covid).
    • Les pays du Sahel : Mali, Tchad, Niger et Mauritanie, continuent leur descente dans le classement des pays acheteurs de livres français : à peine 1,1 million d’euros à eux 4 en 2023.
  • Les DROM & COM affichent un repli par rapport à 2022 : - 7,5% (- 5,2 millions d’euros). Le repli vient principalement de la Réunion (- 12%), de la Guyane (- 22%) et de Mayotte (- 35%, crise sécuritaire). À noter l’absence de réforme des programmes scolaires depuis 2020, qui explique le repli global des achats de ces territoires.

Perspectives pour 2024

Le chiffre d’affaires export cumulé au 30 avril 2024[3] affiche une baisse de 3,2% par rapport à la même période de 2022.
Pour autant, par rapport au 30 avril 2019, et hors achats du Liban (deuxième pays client de la France pour l’exportation de livres en 2019), le chiffre d’affaires à l’export enregistre une hausse de 11,7%.

Les quatre premiers mois de l’année ne sont traditionnellement pas significatifs de l’année en cours, les commandes importantes à l’export n’arrivant qu’à partir de courant mai.
La baisse de 3,2% constatée devrait pouvoir être résorbée d’ici l’été, notamment grâce à la perdurance de la reprise en Amérique latine si elle se confirme.

                                                                                                                                                Olivier Aristide
                                                                                                                                                La Centrale de l’Édition
                                                                                                                                                le 24 mai 2024

 

[1] Périmètre Export pour les douanes : Outre-Mer (DROM & COM) + Étranger

[2] Exprimé en chiffre d’affaires net facturé par les distributeurs aux clients, hors cessions de droits

[3] dont a connaissance la Centrale de l’Edition