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Avant propos

 

LE COMMERCE EXTERIEUR DU LIVRE EN 2022

Statistiques douanières

 

En synthèse

Le CA Export[1] du livre français en 2022 affiche une hausse de 4,2% par rapport à 2021, à 694,1 millions d’€uros (M€).

Après le recul historique constaté en 2020 à 602,5 M€ – les librairies francophones à l’international n’avaient pas bénéficié du même engouement que les librairies hexagonales pour la lecture des français confinés-, alors que l’année 2021 avait déjà retrouvé un niveau « normal » pour l’export du livre français à 665,9 M€ quasi identique au chiffre de 2019, année de référence du « monde d’avant-Covid »

Cette augmentation à l’export de 4,2%, plutôt significative pour un secteur dit mature, contraste avec la baisse observée en France : 

  • ​recul de 2 ,0 % des ventes de livres en France métropolitaine par rapport à 2021, d’après le panel Livres Hebdo-Xerfi  publié en janvier 2023, après une année 2021 exceptionnelle et inédite qui avait enregistré ue hausse de 12 ,5% par rapport à l’année précédente.
    Par rapport à 2019 ; dernière année de référence, le secteur affiche en 2022 une hausse de 5,4%
  • baisse du CA livres de l’édition française à 2 762,5 millions d’ €uros, soit -5,8% par rapport à 2021
    Rappelons toutefois qu’une hausse inédite avait été observée en 2021 à 2 032,0 M€, soit + 12,5%.

La part du CA export par rapport au chiffre d’affaires de l’édition française[2], gagne ainsi 1,5 point en se haussant de 17,3% en 2020 à 18,8% en 2022 (quote-part identique à celle de 2019)

L’analyse menée à partir de la nomenclature des Douanes, -qui distingue 4 catégories : livres, encyclopédies, feuillets (produits imprimés non reliés), et cartes-images-atlas-, confirme la hausse de la catégorie livres stricto sensu à +4% , tandis que la catégorie encyclopédies baisse de 20% , la catégorie feuillets est stable et la catégorie  cartes+images+atlas augmente de 53% versus 2021

Notons que les statistiques douanières sont de plus en plus difficiles à exploiter.

Les données de 2019 et de 2021 n’ont pas pu être publiées au cours du semestre suivant du fait d’incohérences majeures. Les chiffres 2021et 2022 publiés ici prennent en compte des retraitements très importants, opérés en fonction des réponses à nos questions obtenues de la part des Douanes françaises et aussi sur la base des chiffres collectés par la Centrale de l’Edition (activités Assurance-crédit et Transport).

Les 2 principales sources d’erreur recensées dans les statistiques recueillies par les Douanes sont les suivantes :

  • Transferts opportunistes par Amazon, de leurs stocks de livres français d’un pays européen à l’autre,  à la recherche de couts d’exploitation moindres.
  • À la suite du Brexit début 2021, utilisation par certains exportateurs britanniques de la France, comme plateforme d’entrée dans l’Union européenne puis d’expédition vers d’autres pays de l’UE.

Ainsi pour les années 2022 et 2021, un retraitement à la baisse de l’ordre de 160 M€ au total a été opéré d’une part sur les exportations françaises vers plusieurs pays d’l’UE, et d’autre part sur les importations en France depuis ces mêmes pays européens, dont le Royaume-Uni.

 

Les importations de livres (après retraitements ci-dessus et incluant les livres français imprimés à l’étranger) ont aussi augmenté en 2022, mais de manière plus importante : +15,5 % à 1 011,4 M€.

Les importations et fabrications en provenance d’Asie (y compris l’Inde) ont augmenté de 28,7% à 154,6 M€, compte tenu de la demande exceptionnelle du marché français et de la forte hausse du cout de fabrication en Europe

Parmi les pays européens fournisseurs d’impressions délocalisées, l’Italie et l’Espagne progressent de 5,4 %, ce qui correspond toutefois à une baisse en volume face à la forte hausse des prix de revient.

Le déficit commercial du Livre se creuse à 317,3 M€ par rapport à 209,7 M€ un an auparavant (+ 51%).

 

Evolutions des principaux marchés à l’export

Zones francophones et non francophones :
Sur un marché de l’export en développement de 4,2%, la francophonie ne progresse que de 2,5%.
Les pays francophones du Nord ont stagné par rapport à 2021 : +0,4%.
Leur part de marché s‘est ainsi réduite de 56,3% à 54,3% du total.
La francophonie du Sud progresse elle de 9,0% portée par la l’Outre-Mer.  
La part des exportations vers les pays non francophones en 2022 revient ainsi à 27,3%, exactement son niveau moyen sur les 8 dernières années.

Détaillé par zones géographiques, la hausse de 28,2 M€ du chiffre d’affaires à l’export (+4,2%) s’explique
par les quelques variations majeures suivantes :

  • la stabilité globale des importations des  4 premiers pays clients de l’édition française à l’export :
    Belgique, Suisse, Luxembourg et Canada.
    Ce groupe représente traditionnellement environ 54% de l’export total., en dehors de l’année 2020, année atypique de la crise sanitaire mondiale
  • Les 4 premiers marchés européens (hors Belgique, Suisse et Luxembourg), l’Allemagne, le Royaume-Uni,
    l’Espagne et l’Italie
    peinent à retrouver leur niveau d’achats d’avant crise sanitaire.
    Ils restent dans leur ensemble à 8% en-dessous de la moyenne 2015-2020, tout en maintenant leurs postions de premier,
    deuxième, troisième et huitième rangs des pays acheteurs de l’édition française.  
  • 1er importateur historique du Proche et Moyen-Orient (60% des importations de la zone) ,
    le Liban a vu  s’effondrer la demande du pays en 2020, à la suite d’ une série de drames :
    crise financière fin 2019 , toujours actuelle,  crise sanitaire à partir de mars 2020 et explosion du port de Beyrouth début août de la même année.

    Le pays a réduit ses importations aux seuls livres scolaires et parascolaires des élèves des établissements enseignant en français. Il a ainsi enregistré une baisse vertigineuse de ses achats de livres français : de 8,8 M€ en 2019 (chiffre habituel des années antérieures) à 1,8 M€ en 2021, niveau le plus bas inédit, pour revenir à 3,0M€ en 2022, ce qui le porte de la 11ème place des pays importateurs en 2019 au 24ème rang en 2022.

    Dans l’éventualité d’un accord financier avec le FMI (peu vraisemblable à court terme), la stabilité de la monnaie libanaise permettrait immédiatement une reprise significative des importations de livres sur un marché asséché en ouvrages en français.

 

  • l’Amérique latine, violemment touchée par la pandémie mondiale, a presque retrouvé le chiffre d’importations de 2019 à 6,5 M€, grâce à une hause de 17,7% en 2022 par rapport à l’année précédente, observée principalement au Mexique ( +0,5 M€).

    Le Brésil reste à un niveau historiquement faible : 0,4 M€ par rapport à une moyenne annuelle de  1,8 M€ en  2017 et années antérieures. Les 3 premiers importateurs brésiliens historiques ont fait faillite entre 2018 et 2022.

  • Maghreb : les importations de cette zone se sont stabilisées à 25,9 M€ (+1,1% ) par rapport à 2021 et ont même légèrement progressé (+6,4%) par rapport à 2020.

    Les 3 pays présentent des évolutions très contrastées :

  • Algérie : -0,3 M€, (-8,6%) par rapport à 4,0 M € en 2021. Les importations algériennes ne cessent de diminuer année après année depuis 2015 : crise budgétaire algérienne les premières années avec le recul des prix du gaz et du pétrole dans la 2ème moitié des années 2010 ; plus récemment, crise diplomatique entre l’Algérie et la France provoquée par la réduction drastique des visas concédés par la France, reprise de la volonté sur le long terme de privilégier l’arabe comme langue d’enseignement du primaire jusqu’à l’universitaire inclus .  Les importations sont devenues inférieures à celles de la Tunisie, pour des populations sans commune mesure ( 43,9 millions d’hab. en Algérie, 11,8 millions d’hab. en Tunisie) 
     
  • Maroc : hausse par rapport à 2021 : +0,5 M€ ( +3,0%) qui permet de revenir au niveau de 18 M€  d’achats , identique à celui de 2015

    Pour autant les achats avaient atteint un niveau record de 20 M€ en 2017 et 2018.
    Et l’Etat marocain affiche clairement sa volonté de privilégier désormais l’anglais comme 1ere langue étrangère,
    au détriment du français, et ce dès le primaire.

     

  • Tunisie : petite hausse de 2,3 % à 4,2 M€ ; la Tunisie dépasse désormais les achats algériens de 0,5 M€ ; on reste toutefois assez loin du niveau record de 5,4 M€ en 2019, avant la crise Covid.
  • l’Afrique francophone subsaharienne retrouve le  niveau d’achats de 2020 à 28,6 M€, mais reste très en-dessous du niveau d’achats base 100 de 2010 , et très en-dessous du record historique d’achats de 2014 de 42,3 M€ qui avait enregistré un marché exceptionnel en Rép. démocratique du Congo de près de 14,3 M€ .
  • achats du Cameroun et de la Côte d’Ivoire les plus importants sur les 5 dernières années : 11,3 M€ à eux deux.
  • queue de marché institutionnel en RdC pour 1 M€
  • rebond de Maurice avec 1,2 M€ d’achats de livres français, qui retrouve le niveau de 2019,  
    après 2 années de repli ( crise du tourisme lié à la crise Covid ). Pour autant, le repli reste de 33% par rapport à 2016
  • Les pays du Sahel : Mali, Tchad, Niger et Mauritanie, continuent leur descente dans le classement  des pays acheteurs de livres français : à peine 1,5 M€ à eux 4 en 2022

 

  • l’Outre-Mer (DROM & COM selon l’appellation nouvelle) affiche  une progression très honorable de +3,5% (+2,4 M€).
    Tous les territoires sont en progression, à l’exception notable de la Polynésie.

    Celle-ci enregistre le montant le plus faible de ses achats sur les 7 dernières années, du fait de l’absence de réforme des programmes scolaires, au lycée comme au collège.

    La Réunion tire parti de la densité du maillage des librairies sur toute l’ile d’une part  et du développement marqué du secteur BD-Mangas d’autre part.

    Guadeloupe et Martinique ont vu ces dernières années l’installation de l’enseigne FNAC, générateur d’une concurrence locale qui porte l’offre et les achats à la hausse.

 

Perspectives pour 2023

Le chiffre d’affaires Export cumulé au 31/05/2023[3] affiche une hausse de 3,8% par rapport à la même période de 2022. Et, par rapport au 31/05/2019, hors achats du Liban (2nd pays client de la France pour l’exportation du livre en 2019), le CA à l’export enregistre une hausse de 14,3%

Les 5 premiers mois de l’année ne sont traditionnellement pas significatifs de l’année en cours, les commandes importantes à l’export n’arrivant qu’à partir de courant mai.

Pour autant, ce maintien d’une progression modeste mais de long terme - si elle se confirme-,  est plutôt de bonne augure, malgré l’effondrement  du marché libanais, et le fort repli du marché sud-américain.

 

Une reprise des importations algériennes (déjà espérée depuis 2 ans, sans se concrétiser) en réaction aux 5 précédentes années d’assèchement de l’offre de livres français, pourrait aussi contribuer à une nette reprise des exportations françaises de livres en 2023

 

                                                                                                                                                              Olivier ARISTIDE

                                                                                                                                                              La Centrale de l’Edition
 
                                                                                                                                                             Le 26 juin 2023

 

 

[1] Périmètre Export pour les douanes : Outre-Mer (DROM & COM) + Etranger

[2] Exprimé en CA net facturé par les distributeurs aux clients, hors cessions de droits.

[3] dont a connaissance la Centrale de l’Edition